Décret tertiaire : « 2025 sera la première année d’une nouvelle ère »

Le dispositif Éco Énergie Tertiaire (EET), défini par le décret tertiaire du 23 juillet 2019, a imposé aux assujettis de déclarer leur consommation d’énergie sur la plateforme Operat avant le 31 décembre 2022. De quelle manière les acteurs du tertiaire s’emparent-ils de la réglementation depuis cette échéance ? Eugenio Da Rocha, responsable prescription régionale Ile-de-France chez Atlantic Systèmes, livre son point de vue.

Atlantic Systèmes accompagne les acteurs du secteur tertiaire dans leur démarche de sobriété énergétique : quel regard portez-vous sur l’application du décret tertiaire ?

Les propriétaires et preneurs à bail de bâtiments assujettis ont tout d’abord été très préoccupés par la nécessité d’effectuer leur déclaration sur Operat, qui impliquait de réunir leurs factures d’énergie. Depuis un an, cela évolue. Les retours sur Operat sont positifs car la plateforme est visiblement bien faite, avec une Foire aux Questions extraordinairement intéressante qui explique de nombreux cas de figures très précis.

Surtout, je constate que les acteurs du tertiaire prêtent enfin une réelle attention aux objectifs de réduction des consommations d’énergie finale imposés par le DEET. Ce retard à l’allumage s’explique notamment par la publication tardive et progressive des seuils de consommation d’énergie finale (les Cabs). De nombreuses personnes ont dû raisonner en année par défaut, avant la publication de 5 arrêtés « valeurs absolues ».

Les réactions et stratégies d’action divergent-elles,  chez les assujettis ?

Elles sont hétérogènes, en effet. Les propriétaires et preneurs à bail de bâtiments tertiaires indépendants, qui possèdent très peu de bâtiments et majoritairement dans le parc privé, effectuent les démarches relatives à Operat par eux-mêmes. Leur vision est plutôt à court terme. 

A l’inverse, les assujettis qui gèrent un parc immobilier tertiaire important, généralement dans le public, ont été en mesure de débloquer des fonds afin de confier leurs déclarations de consommation énergétique à un expert, lancer des audits énergétiques et commencer à se raccorder en GTB. Ils développent quant à eux une vraie stratégie sur 30 ans. C’est le cas par exemple des grands acteurs de la santé publique, qui vont devoir baisser leurs consommations sur des postes où il existe des contraintes techniques fortes.

Comment Atlantic Systèmes accompagne-t-il les acteurs du tertiaire, dans l’optique du décret tertiaire ?

Nous mettons en place des systèmes types simples, éprouvés et surtout adaptés à chaque typologie de bâtiments. Pour un EHPAD, par exemple, nous avons étudié 6 scénarios types afin d’éclairer le choix de l’assujetti en fonction des critères qui lui sont propres. Nous finalisons d’autres scénarios pour l’enseignement, l’hôtellerie, la santé avec comme ambition d’apporter la même réponse sur tous les segments concernés.

Par ailleurs, nous avons développé en interne un outil d’aide à la décision pour choisir entre les objectifs en valeur absolue et la valeur relative, puis de visualiser rapidement l’impact en baisse de consommation de nos PAC (Pompe à Chaleur). Cet outil Atlantic Systèmes, très apprécié des bureaux d’études, est constamment mis à jour et intègre les 267 fiches de sous-catégories d’usage, les 7743 seuils en vigueur (Cabs) ainsi que les dernières valeurs de consommation et de répartitions d’usages (chauffage, ECS, climatisation…) des bâtiments tertiaires en date et publiées par le CEREMA.
 

Selon vous, quels sont les principaux enjeux pour les prochaines années ?

Le premier enjeu reste celui de l’information sur la réglementation qui n’est pas uniforme et pour laquelle il y a un vrai travail à mener. Il m’arrive de rencontrer des assujettis n’ayant pas encore rempli Operat ou qui ignorent l’existence de seuils absolus de leur activité.

Très rapidement, à partir du 30 septembre 2026, il sera possible de déposer un dossier technique justifiant une demande de modulation des objectifs de réduction des consommations énergétiques en fonction de contraintes spécifiques du bâtiment (techniques ou architecturale) ou d’un TRI (Taux de Retour sur Investissement) trop important. Là encore, ces points cruciaux sont très peu connus et évoqués.

Le montage financier des travaux avec l’obtention d’aides (CEE, fond de chaleur, etc.) sera aussi un autre élément clé pour tenir ces engagements réglementaires. 

Enfin, il y a un enjeu d’anticipation car la demande va s’accélérer pour tenir les objectifs. Chez Atlantic Systèmes, la pompe à chaleur est le matériel qui permet de réaliser des économies d’énergie importantes. Or, la PAC ne s’installe pas en lieu et place d’une chaudière. Des adaptations techniques, via des études thermiques et fluides, sont à planifier en amont. Je suis enthousiaste car j’ai l’intuition que 2025 sera la première année d’une nouvelle ère, marquée par la volonté de poser des actions concrètes afin de consommer moins d’énergie.